« Uploaded to the cloud… Sounds like heaven ! » Téléchargement de conscience, réflexivité et ré-enchantement de la technologie dans trois fictions sérielles anglophones
- Authors
- Publication Date
- May 28, 2024
- Source
- Hal-Diderot
- Keywords
- Language
- French
- License
- Unknown
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Abstract
Cet article se penche sur l’appropriation par trois séries télévisées contemporaines des visions utopiques post-humanistes de la vie après la mort dans un univers virtuel grâce au « téléchargement de conscience », une technologie actuellement inexistante, mais faisant l’objet de nombreuses discussions et projections. À rebours d’autres œuvres de science-fiction qui explorent le possible revers dystopique d’une existence dans un univers virtuel ou de la survie de l’esprit dans un ordinateur, l’épisode « San Junipero » de la saison 3 de Black Mirror (2016), Years and Years (2019) et Upload (2020-) « ré-enchantent » dans une certaine mesure, mais surtout à leur manière, la technologie fictive du « transfert » de conscience. Leur réflexivité parfois foisonnante – en particulier dans Black Mirror, comme le laisse entendre son titre – est à la fois « exhibitionniste » et « contenue » dans la mesure où elle ne vient jamais opérer un effet de distanciation brechtien rompant l’engagement émotionnel des spectateurs dans le récit, et suscite même l’émerveillement par des formes se rattachant à la réflexivité « opérationnelle », identifiée par Jason Mittell dans de nombreuses séries télévisées depuis les années 1990, mais aussi à la réflexivité typique des comédies musicales étudiée par Jane Feuer. Croisant la science-fiction avec des genres variés, tels que, entre autres, le mélodrame (« San Junipero »), la politique-fiction (Years and Years) ou la comédie romantique (Upload), les trois séries se rejoignent dans leur résistance aux biais androcentriques et capitalistes des écrits post-humanistes, ainsi que dans leur réorientation de la focale post-humaniste de la « performance » vers l’amour. Elles offrent une vision rassurante de la puissance de l’humanité face à une technologie à l’impact potentiellement bouleversant sur la vie humaine. La réflexivité ludique omniprésente d’Upload permet à la série d’établir un rapport de taquinerie et de camaraderie avec le public, tandis que « San Junipero », en opérant sur le mode du trompe-l’œil, s’avère certainement plus propice à une déstabilisation des repères devenant source de questionnements. Sans transformer en cauchemar le rêve post-humaniste de l’au-delà virtuel, ces trois séries donnent à réfléchir aux enjeux existentiels, philosophiques, sociaux, économiques et éthiques d’un tel devenir de l’humanité.