Le proscrit, le banni, l’émigré. Les représentations littéraires et artistiques sous les régimes nazi et soviétique
- Authors
- Publication Date
- Jan 01, 2019
- Source
- HAL-UPMC
- Keywords
- Language
- French
- License
- Unknown
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Abstract
L'étude se donne pour objectif d’interroger le regard des écrivains porté sur la figure et la représentation du proscrit, du banni, de l’émigré, à travers l’imaginaire littéraire en Europe centrale, orientale et occidentale pendant les régimes nazi et soviétique. Une réflexion sera également proposée sur les représentations visuelles (peinture, cinéma, affiches) où l’Autre est stigmatisé, bafoué, appelé à l’anéantissement. L'expérience totalitaire, selon Hannah Arendt, « a manifestement pulvérisé nos catégories morales, ainsi que nos critères de jugements moraux » (Arendt 1990). Fondés sur la vision unilatérale et homogène qui n’admet aucune autre idée, aucune alternative, les régimes nazi et soviétique se sont attachés au principe de l’exclusion où l’Autre, stigmatisé comme catégorie séparée, quel que soit le « fondement » de son altérité, raciale ou de classe, devait être soit rééduqué et transformé en homme nouveau, soit éliminé (cette rééducation étant d’emblée impossible pour certains groupes ethniques ou sociaux). La formation de cette « nouvelle catégorie de population » (Rouvillois 2014), où l’être humain n’est pensé qu’en fonction de l’uniformité et de la collectivité, regroupe la présence des Autres (tels l’artiste ou l’écrivain qui ne partagent pas la « vision du monde » prônée, l’intellectuel, le Juif, l’homosexuel…) sous l’appellation de l’« ennemi du peuple » ou, comme l’appelle Lydia Tchoukovskaïa, de l’« étranger » [чуждый] (Tchoukovskaia 1980) – extérieur au nouvel espace organisé ou à organiser. Cette catégorie de l’altérité se constitue en l’« homme en trop » (Javakhishvili 1929) qui n’a pas sa place dans l’espace et la réalité nazie ou soviétique. Dans ce contexte, il est envisagé d’interroger les représentations littéraires et artistiques de ceux qui refusent d’« être de ce temps » (Horvath 1938), partent en exil ou continuent à écrire « entre les lignes », ou bien mettent en scène l’image du proscrit, du banni, de ceux qui, à l’instar des personnages de Zweig, « se sentent étrangers, inutiles en ce monde » nouveau (Ivresse de la métamorphose, 1938-39).