Intimes liminalités : Poétique des frontières et figuration du Moi dans l'œuvre nouvellistique de Juan Bonilla
- Authors
- Publication Date
- Jul 01, 2024
- Source
- HAL
- Keywords
- Language
- French
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- Unknown
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Abstract
L’objectif de la thèse est de démontrer l’existence, dans l’œuvre nouvellistique de Juan Bonilla, d’une double articulation poétique entre l’imagerie de la frontière, la redéfinition spéculaire de la littérarité par l’entremise de l’hybridité générique du texte et la construction d’une modalité autoréférentielle particulière fondée sur cette réactualisation métalittéraire du motif liminaire. La réflexivité bonillienne s’inscrit dans un régime éloigné d’une mimésis consciente et l’identité auctoriale demeure toujours à la marge de l’objet du discours, perpendiculaire à la substance de la narration. Cette identité s’exprime par d’autres biais : par le style, d’abord, qui joue d’un système pronominal poly-référentiel entretenant l’ambigüité des niveaux énonciatifs ; et par le labyrinthe hypotextuel que chaque récit convoque, comme l’immense cartographie d’une mémoire lectoriale, véritable peinture d’une intimité auctoriale latente. Le Moi bonillien s’exprime par la « figuration » (Pozuelo Yvancos), ou encore par « l’incorporation » auctoriale (Maingueneau), qui point dans l’acte de réception et dans le partage intime entre le texte et son lecteur, et par extension, entre les lecteurs de références intertextuelles communes. Les nombreuses références intertextuelles, les analyses littéraires enchâssées dans les récits, les considérations métalittéraires et autres jeux spéculaires et transfictionnels édifient une ample bibliothèque de l’intimité auctoriale, un univers de lectures qui donne à voir tout ce que la littérature a construit de l’identité de l’écrivain. Car l’objet central du discours bonillien n’est autre que la littérature elle-même. Dans le parcours vagabond de la mémoire lectoriale de Bonilla, transparaît la figuration d’une identité qu’il souhaite montrer par l’intime rencontre qui se tisse dans l’interstice d’un souvenir de lecture partagée. En cela, la transgénéricité entretenue jusqu’au flou générique participe à la construction de l’unique catalogue de son intime bibliothèque. L’autoréférentialité bonillienne s’exprime à la frontière des genres, dans l’espace liminaire de l’intertexte, au cœur de l’interface intime qui se crée par l’expérience partagée d’une lecture, par l’empreinte identitaire que le texte laisse sur le lecteur et qui renseigne l’identité de tous les autres lecteurs d’un même texte. L’autobiographisme bonillien s’érige ainsi sous la forme d’une « bio-blographie » : une écriture des souvenirs de lecture qui ont gravé dans l’identité auctoriale une réalité bien plus tangible, et plus apte à être partagée, que celle d’un réel empirique menacé par l’ombre du soupçon post-mimétique. Dans son intime bibliothèque, Bonilla nous offre la vision d’une nouvelle manière de faire signifier l’identité, de dépeindre une intimité liminaire, sise dans l’utopie infinie du limes (Louis Marin), du chemin à la frontière ambivalente entre le texte et la vie.