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De la Gageure indiscrète de Kreutzer aux Miroirs de Ravel : Shakespeare fragmenté au prisme de la musique française

Authors
  • Schütz, Chantal
Publication Date
Oct 06, 2016
Source
HAL-UPMC
Keywords
License
Unknown
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Abstract

Parler de Shakespeare dans l’opéra français est surtout parler d'une absence. On peut noter les tentatives d’adaptations directes que sont le Hamlet d’Ambroise Thomas et le Roméo et Juliette de Gounod, mais on cherchera en vain des triomphes comparables aux succès italiens de Macbeth ou Otello. Si Berlioz lui-même ne retient que le "système shakespearien" pour les Troyens, et ne garde de Beaucoup de bruit pour rien que l’intrigue légère de Béatrice et Bénédict (1858), comment s’étonner que soixante-dix ans plus tard, Reynaldo Hahn ait privilégié dans son Marchand de Venise la légèreté vénitienne, à l’instar de la célèbre mise en scène de Theodore Komisarjevsky (Stratford, 1932) ? Faut-il voir dans cette logique d’adaptation sélective une forme de mise aux normes pour la scène lyrique française ? La réception de certaines œuvres qui disparurent rapidement du répertoire semble conforter cette piste, si l’on en juge par la très brève carrière de trois adaptations de Cymbeline : Imogène ou la Gageure indiscrète de Kreutzer (1796), Dinah d’Edmond Missa (1894) ou Cymbeline de Claude Arrieu (1958–1963). Sur la longue durée, la présence de Shakespeare serait donc plutôt à chercher dans des emplois indirects qui passent par la citation brève ou l’épigraphe. Surtout, elle le serait au prix d’une spécialisation soit du côté du signifiant, soit du côté du signifié. Côté signifiant, Maurice Ravel place le recueil pour piano des Miroirs sous le signe d’un vers singulièrement surtraduit de Jules César : « La vue ne se connaît pas elle-même avant d’avoir voyagé et rencontré un miroir où elle peut se reconnaître ». (I-2) - “the eye sees not itself but by reflection, by some other things.” Côté signifié, dans Pelléas et Mélisande, Debussy et Maeterlinck procèdent par petites touches incorporant un héritage shakespearien par bribes, une dissémination par personnages extraite de plusieurs tragédies. C’est le visage de ce Shakespeare fragmenté que cette communication s'est attachée à faire apparaître.

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