Elsevier rachète Mendeley : et vous, que ferez-vous ?

Les critiques fusent face à l’annonce du rachat alors que la startup paraît heureuse du sort qui lui est fait

Tout ceux qui s’intéressent à l’Open Access ou à l’édition scientifique l’auront entendu : Elsevier vient officiellement d’acheter Mendeley, une plateforme de gestion de références bibliographiques. Depuis mardi matin, cette annonce fait le buzz sur les réseaux sociaux scientifiques et les médias qui s’y intéressent. La majorité des réactions sont négatives. Le nom même d’Elsevier sonne comme une musique angoissante dans un film d’horreur. Celui qui l’entend est aux augets. Il sait que quelque chose de mauvais va probablement arriver. Ce déclenchement d’hostilités est-il totalement justifié ? Retour sur cette affaire.

Tous ceux qui s’intéressent à l’Open Access ou à l’édition scientifique l’auront entendu : Elsevier vient officiellement d’acheter Mendeley, la plateforme de gestion de références bibliographiques. Depuis mardi matin, cette annonce fait le buzz  sur les réseaux sociaux scientifiques et les médias qui s’y intéressent. La majorité des réactions sont négatives. Le nom même d’Elsevier sonne comme une musique angoissante de film d’horreur. Celui qui l’entend est aux aguets. Il sait que quelque chose de mauvais va probablement arriver. Ce déclenchement d’hostilités est-il totalement justifié ? Retour sur cette affaire.

 

Cet article existe aussi en anglais : « Elsevier takes over Mendeley: And you, what do you think? ». Il a été traduit du français vers l’anglais par Timothée Froelich

 

 

 

Le grand méchant éditeur

 

Depuis janvier 2013, une rumeur courait concernant le rachat de Mendeley par Elsevier. Elsevier est l’un des trois grands mastodontes de l’édition scientifique. C’est aussi celui qui est le plus violemment et fréquemment critiqué pour de nombreuses raisons : ses prix qui ne cessent d’augmenter, sa politique commerciale, l’utilisation parfois peu éthique faite avec les bénéfices et encore d’autres supercheries (journaux fantômes, articles sujets à un fort conflit d’intérêt…).

 

Depuis quelques années et la montée en puissance du mouvement pour l’accès libre aux publications scientifiques (Open Access), Elsevier comme la plupart des autres grands éditeurs scientifiques a déployé d’importantes ressources pour redorer son blason. Alors qu’en est-il du rachat de Mendeley ?

 

L’annonce du rachat

 

Le 9 avril, Mendeley et Elsevier annonçaient officiellement la transaction. Le montant de celle-ci est estimé entre 69 et 100 millions de dollars selon TechCrunch. Un montant équivalent à 70 ou 100 fois le chiffre d’affaire de la petite entreprise. Ce même jour, l’équipe Mendeley publiait sur son blog un joyeux post annonçant l’heureux événement. Le titre est parlant : « L’équipe Mendeley rejoint Elsevier. De belles choses sont sur le point d’arriver ! » Le message est accompagné d’une photo de famille, les 50 membres de l’entreprise :

 

L'équipe Mendeley (Source : Flickr)

 

Mendeley est une startup créée en 2008. Son logiciel de gestion de références bibliographiques compte aujourd’hui plus de 2 millions d’utilisateurs qui interagissent aussi grâce aux fonctionnalités sociales de cette plateforme d’échange. Mendeley fait partie des outils pour la recherche que nous avions listés dans un article intitulé : Les Nouveaux Outils Numériques pour la recherche scientifique. Sans être le plus ouvert des outils, Mendeley vise clairement à favoriser les échanges entre chercheurs. C’est un outil de partage qui a toujours soutenu l’Open Access et l’Open Science.

 

Des réactions outrées, un sentiment de trahison

 

Personnellement j’ai appris la nouvelle sur une liste de diffusion sur l’Open Science. Le jour-même, des articles ont été publiés sur TechCrunch par exemple, mais aussi sur le Financial Times, the Guardian et sur le Herald Online. Les réponses ne se sont pas faites attendre : « Je quitte Mendeley car je ne souhaite pas offrir mes données à Elsevier », « Je suis un utilisateur de Mendeley. Je crains les changements à venir. »

 

Elsevier possède son propre réseau social pour scientifique dont nous avions déjà parlé sur MyScienceNews (Les réseaux sociaux pour scientifiques) : SciVal, et sa version gratuite BioMedExpert. L’entreprise d’édition possède aussi ses propres sites de recherche bibliographique : Scopus et ScienceDirect. Pourquoi ce sur investissement de la part de l’éditeur ? Quel intérêt y trouve-t-elle ? Est-ce comme son site l’annonce, pour améliorer son offre d’échanges de sources et de bibliométrie ? Pour redorer son blason ? Ou pour éliminer des concurrents trop Open comme le suggèrent certains ?

 

 

 

Les explications enthousiastes des fondateurs

 

Mendeley permet le partage de références mais aussi de fichiers entre les utilisateurs. Il a parfois été vu comme un contre-pouvoir cour-circuitant l’édition scientifique classique. Alors pourquoi rejoindre l’éditeur scientifique le plus détesté du milieu académique ?

 

Face à cette question, plutôt que de rester silencieux, les membres de Mendeley ont donné des interviews. Le post publié sur leur blog est un long argumentaire expliquant qu’Elsevier est une société de 7 000 employés comptant, comme partout, des bons et des moins bons. Le post continue en assurant ses utilisateurs qu’Elsevier a souvent collaboré avec Mendeley avec succès et que l’éditeur a souvent fait leur promotion. Il cite le moment où, supprimant son propre service de gestion bibliographique, l’éditeur avait fourni une compatibilité d’export des données des utilisateurs vers Mendeley en suggérant à ses membres de rejoindre la plateforme gratuite.

 

A plusieurs reprises après la levée de l’embargo, le fondateur de Mendeley, Victor Henning, a pris la parole afin de rassurer ses usagers. Lors de toutes ses interventions, il assure sa confiance totale à Elsevier et affirme que leur partenariat ne dépravera pas l’offre de Mendeley. Selon lui, cette nouvelle situation donnera à la startup les moyens de se concentrer sur ses objectifs de manière très indépendante et sans avoir à forcer la monétisation de ses services. Une communication qui semble porter ses fruits puisque des réactions beaucoup plus mitigées ou positives ont depuis fleuri sur le web.

 

Et vous, qu’en pensez-vous ?

 

Nous serions curieux de connaître vos réactions concernant ce sujet. Elsevier tente-t-il de s’acheter une bonne conscience ou bien fait-il des efforts pour se rapprocher des besoins et revendications de la sphère académique ? L’idée qu’Elsevier possède Mendeley vous fera-t-elle changer d’opinion sur ce logiciel somme toute très utile ?

Les paris sont lancés et vos commentaires sont les bienvenus !

 

 

 

Pour en savoir plus :

Sur Actualitté Le rachat de Mendeley par Elsevier confirmé.

 

Par The Scholarly kichen, A Matter of Perspective — Elsevier Acquires Mendeley . . . or, Mendeley Sells Itself to Elsevier